MME BOUARE FILY SISSOKO ET LE COMMISSAIRE COLONEL-MAJOR DABITAO N’ONT- ILS PAS AUSSI DROIT À LA LIBERTÉ ?
La nouvelle ère de la transition entamée avec la nomination du général de Division Abdoulaye Maiga est sous le signe de la paix, de la concorde de l’entente et de l’Unité. En mission pour relever la transition et mettre en œuvre le cadrage de l’action gouvernementale édictée par le président le Général d’armée Assimi Goita, le premier ministre Abdoulaye Maiga fait jusque-là un sans-faute. C’est dans le cadre de cette mission que les onze cadres politiques qui étaient incarcérés depuis cinq mois ont recouvré la liberté malgré un premier refus. Ce dénouement intervient au moment ou le nouveau premier ministre est à la manœuvre pour décrisper le climat social, une démarche salutaire que les maliens souhaitent voir s’élargir a d’autres détenus d’un âge avancé qui ne cessent de demander d’être mis en liberté, à savoir l’ancienne ministre de l’économie et des finances, Mme Bouaré Fily Sissoko et le commissaire colonel major Nouhoum Dabitao.
Quitte à faire un travail, autant bien le faire disent certains. Le renouveau de la transition malienne se déroule sous de bons auspices. Après trois ans d’avalanche d’inculpations et d’incarcérations de personnalités, il semblerait que la situation se décrispe et que les autorités de la transition veuillent aller vers un climat social plus apaisé. Dans cette optique, on assite à la libération de personnes incarcérées et pour lesquelles les appels à la clémence n’ont cessé de se multiplier.
Tel est le cas de l’ancienne ministre de l’économie et des finances, Mme Bouaré Fily Sissoko et l’ancien questeur du conseil national de la transition, le commissaire colonel Nouhoum Dabitao, tous deux détenus dans le cadre des dossiers dits d’achat de l’avion président et des équipements militaires.
Durée légale de la détention préventive dépassée pour Mme Bouaré
Incarcérée depuis le 26 Aout 2021 dans le cadre de l’affaire conjointe dite d’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires, Mme Bouaré Fily Sissoko a largement dépassé la durée légale de détention préventive qui est fixée à trois ans selon la loi. Ayant toujours demandé à être jugée afin que la vérité éclate, il aura fallu plus de trois ans avant que le procès qui était tant attendu, soit ouvert dans le cadre de la session spéciale de la cour d’assises sur les crimes économiques et financiers. Après trois semaines d’audience, et au regard de la complexité des dossiers, accentuée par l’absence de certains protagonistes qui sont décédés ou sont absents, la cour a décidé de renvoyer ladite affaire pour « complément d’informations » et exiger l’écoute d’autres témoins. En définitive, les trois semaines de procès n’ont clairement pu établir la culpabilité de la détenue qu’est Mme Bouaré qui a au contraire permis de mettre au grand jour l’implication des réels acteurs omis lors de l’instruction.
Les accusations contre le sieur Dabitao « infondées »
Placé sous mandat de dépôt le 14 mars 2024 dans le cadre de l’affaire Dite d’achat des équipements militaires, le commissaire Colonel-Major Nouhoum Dabitao a volontairement démissionné de son poste de questeur du conseil nationale de la transition en début d’année pour se mettre à disposition de la justice. Son objectif tout comme Mme Bouare Fily Sissoko, était de monter sa bonne foi et contribuer à la manifestation de la vérité dans cette affaire ou son nom a été bafoué.
Au cours dudit procès qui aura duré trois semaines, les différents passages des témoins à la barre ainsi que les déclarations faites par le sieur Dabitao ont démontré que les accusations portées à son encontre et qui lui ont valu d’être inculpé « d’atteinte aux biens publics, faux et usage de faux et complicité » ne « sont Pas fondées ». Aussi, la documentation fournie par le ministre de la défense et des anciens combattant ainsi que par la direction du commissariat des armées dont il était a la tête au moment des faits a lui reprochés, ont permis de démontrer que contrairement aux accusations, « tous les matériels militaires ont été livrés », comme en a attesté un témoin à la barre face aux juges de la cour.
Refus de la demande de mise en liberté
Les trois semaines de procès ont permis de mettre en exergue le manque de preuves à l’encontre des accusés ainsi que la complexité du dossier qui aura nécessité un renvoi du procès par la cour pour « complément d’informations ». La cour ne s’étant pas prononcé sur la mise en liberté des accusés, les conseils respectifs de ceux-ci ont alors introduits une demande auprès de la cour suprême. Selon la loi, la liberté reste le principe et la détention préventive l’exception. Malgré cette règle, Mme Bouaré Fily Sissoko qui est incarcéré depuis plus de trois ans et le commissaire colonel Major Nouhoum Dabitao se sont vu refuser la « liberté provisoire ». Dans l’arrêt rendu par la cour suprême, le refus de la liberté est motivé par le fait que « la détention de l’inculpée Mme Bouare Fily Sissoko s’avère nécessaire pour la manifestation de la liberté au regard de la gravité des faits… ». Pour ce qui est du commissaire Colonel-major Nouhoum Dabitao, la cour suprême estime que sa liberté pourrait « porter entorse a la procédure en cours, vu sa participation dans la chaine de commission des faits… ».
Des détenus exténués
Le poids de l’âge est une chose, et le poids des épreuves en est une autre. Âgés respectivement de 69 et 52 ans, les détenus Mme Bouaré Fily Sissoko et le commissaire Colonel Major Nouhoum Dabitao affichent les signes du poids des épreuves et du temps. Nul besoin de les voir pour comprendre que la vie continue de faire son travail. Face aux juges de la cour d’assises spéciale, ces détenus qui n’ont eu pour seul tort de vouloir être blanchis, sont aujourd’hui a une étape de leur existence ou tout un chacun souhaiterai être auprès de sa famille et jouir des petits plaisir que la vie offre. Après tant d’années de détention et de patience, Mme Bouaré Fily Sissoko et le commissaire colonel major Nouhoum Dabitao n’ont aucune volonté d’entraver la poursuite de l’instruction judiciaire a laquelle ils ont eux même participé pour la manifestation de la vérité. Contrairement à d’autres personnes qui sont aussi poursuivies dans ces dossiers et qui ont pris la poudre d’escampette afin de s’extirper du joug de la justice.
Au regard de ce qui précède et du fait qu’aucune date n’a pu être fixée pour la tenue d’un autre procès, le premier ministre, général de division Abdoulaye Maiga, au regard de sa volonté d’aller vers un apaisement du climat social, doit s’impliquer pour que ces détenus, tout comme les 11 cadres politiques récemment relâchés, puissent obtenir la « liberté provisoire » et retourner auprès de leurs familles. Des détenus qui, il faut le dire, sont aujourd’hui devenu le symbole de la résilience face à trop de coups portés à leur encontre sans qu’ils ne puissent se défendre.