lun. Déc 2nd, 2024

MR ALI MOUSSA MAÏGA, PRÉSIDENT DU MOUVEMENT DES JEUNES PATRIOTES DE GAO DANS UN ENTRETIEN ACCORDÉ AU NOUVEL HORIZON :


« Nous irons au referendum dès que les groupes marcherons et qu’on aura notre eau potable »

Les populations de la Région de Gao, connaissent des moments difficiles dû à la situation sécuritaire instable à laquelle sont venues s’ajouter les coupures intempestives d’eau et d’électricité. Face à cet état de fait, et après de multiples interpellations à l’intention des autorités, les corps constitués de la société civile de Gao ont décidé de jouer le tout pour le tout et ont annoncé le boycott du referendum constitutionnel dans la région si une fourniture convenable de l’électricité et de l’eau n’étaient pas rétablies. Une dizaine de jours après cet ultimatum lancé aux autorités, les groupes électrogènes qui étaient bloqués à quelques kilomètres de la ville, pour raison sécuritaire, sont finalement arrivés à destination ce dimanche 28 mai. Malgré tout, pour que les choses rentrent dans l’ordre, il reste l’installation de ces groupes électrogènes.

Pour en savoir davantage sur ce que vivent réellement les habitants de Gao et pour connaitre leur sentiment quant à la réception de ces groupes électrogènes et de ce qui adviendra par la suite, nous avons tendu notre micro au président du Mouvement des Jeunes Patriotes de Gao, Un mouvement de résistance née des évènements de 2012 et qui jusqu’à nos jours lutte pour le bien être des populations de Gao. À notre micro, Mr Ali Moussa Maïga, président de ce mouvement a répondu à nos questions.

Nouvel Horizon : Vous êtes le président du mouvement des jeunes patriotes de Gao, que pouvez-vous nous dire sur ce mouvement et sur les différentes actions qu’il mène à Gao ?

Ali Moussa Maïga :  Le mouvement des jeunes patriotes de Gao est né en 2012 pendant la crise. Il fait partie des trois grands mouvements qui existent à Gao. Sa création avait pour but de défendre les intérêts de la population de Gao par rapport aux différents groupes djihadistes séparatistes qui étaient là. Apres le départ de ces groupes, le mouvement a continué à travailler avec l’Etat malien et les différents partenaires. Nous cherchons vraiment à améliorer le quotidien de la population de Gao. Tout ce qui est négatif, que ce soit  du côté de l’Etat ou des patriotes, le mouvement est là pour défendre les intérêts de la population de Gao qui est prioritaire.

Nouvel Horizon : La société civile de Gao dont fait partie votre mouvement a toujours clamé soutenir la Transition. Quelle est la situation actuelle à Gao et quel est votre avis sur l’évolution de la transition en cours ?

Ali Moussa Maïga : Nous soutenons le Mali, nous soutenons la transition avec ses idéologies de développement et de sécurisation. Parceque la sécurisation est la priorité évoquée par la transition. Lors de nos différentes rencontres nous avons été clairs avec les uns et les autres que la population est prioritaire avant tout. On les soutient pour qu’eux à leur tour, en tant que 1ers responsables maliens, ils sécurisent nos populations et leurs biens et qu’on parvienne à avoir la solution pour les déplacés, afin que ceux-ci retournent chez eux et qu’ils soient sécurisés dans leurs localités. Dans ce contexte nous n’avons pas de vision négative du coté de la transition, sauf des bons rapports qui existent entre nous. Mais comme on le dit, la vision de la transition peut être la meilleure vision lorsque les hommes qui l’appliquent le font comme les grands décideurs le demandent. Mais dans les faits, il y a d’autres hommes qui essaient de faire autrement pour leurs propres besoins et pénalisent les autres. Et c’est ça qui fait que parfois il peut y avoir des confrontations entre les différents décideurs qui existent et nous qui sommes société civile ; parceque nous voyons que certains veulent piétiner la vision réelle de la transition qui peut amener la paix.

Actuellement à Gao ce qui est triste est que beaucoup de zones, notamment les communes ou n’existaient pas les bases militaires, les villageois y sont toujours menacés par les djihadistes et beaucoup d’entre eux se sont déplacés pour aller dans les villes de la région de Gao ou dans les cercles pour se sécuriser. Beaucoup d’entre eux ont perdu leurs biens, leurs localités et ils sont là en tant que déplacés dans la ville de Gao. Et en même temps, toujours dans la ville de Gao, les braquages continuent. Ça se multiplie dans la ville de Gao comme sur les tronçons allant de Gao vers d’autres zones. On a aussi le problème de personnes qui sont à chaque fois victimes d’enlèvements ciblés dans la ville de Gao. Ce qui est devenu un phénome trop fréquent alors que nous avons assez de militaires et de forces de défense dans la ville. Malgré tout, il arrive que des personnes soient enlevées et amenées hors de la ville sans que personne ne sache où elles vont. Alors que techniquement la sécurité est renforcée mais il faudra que les forces de défense continuent à travailler et essaient de fournir plus d’efforts sur le terrain.

N H : Il y a quelques jours, les corps constitués de la ville de Gao ont manifesté pour exiger la réhabilitation de l’électricité et de l’Eau qui sont fortement manquants dans cette région. Une dizaine de jours plus tard, vous avez reçu des groupes électrogènes destinés à l’EDM Sa. Quel est votre sentiment par rapport à cette réception qui a nécessité un ultimatum de la société civile ?

A.M.M : Avant de donner mon sentiment, je voudrais dénoncer ce point. Parce qu’il ne faut pas attendre que quelqu’un tombe malade pour essayer de le soigner. Dès qu’on sent des signes de faiblesse il faut chercher à le soutenir. Lors de nos différentes rencontres avec le Premier Ministre, et les ministres qui étaient en visite ici dans la région de Gao, on avait dénoncé cela dans la salle du gouvernorat. On a remis une copie au Premier ministre pour essayer de trouver la solution par rapport aux problèmes de groupe électrogène, par rapport à la Somagep.  Car l’eau qu’on boit ici rend malade. Mais malgré cela, ils ont pris les documents et sont rentrés à Bamako , pour s’asseoir et nous dire que les groupes sont stationnés au niveau de Sévaré. Pendant des mois les groupes n’arrivaient pas à quitter Sévaré à cause de l’insécurité.

 Nous en tant que membre des corps constitués de la société civile, on avait dénoncé cela. On avait démarché qui de droit pour les informer qu’il faut chercher une solution par rapport à cette situation . Si vous ne cherchez pas la solution à cette situation, on est obligés de prendre les choses en main pour décider ce que nous,  en tant que société civile,  on peut faire pour nous faire entendre. C’est de là que la manifestation a été faite pour déclarer au Gouvernement malien qu’il est temps que ces groupes qui sont au niveau de Sévaré, puissent venir au niveau de Gao. Donc lorsque ces groupes étaient en route, on les a attendu pendant des jours. Malheureusement quand le ministre Wagué est venu à Gao, nous n’avions pas l’information que ces groupes étaient en route, parceque la communication est très importante. Si nous avions eu l’information que des groupes étaient en route, la scène qui s’est déroulée dans la salle du gouvernorat de Gao en présence du ministre Wagué n’allait pas se faire. Mais comme on l’a dit devant le ministre, s’ils veulent éviter certaines situations il faut que les choses soient claires entre nous. Parceque lorsque nous, nous avons l’information on se doit d’informer la base pour que les gens sachent réellement que ces groupes sont là.

Actuellement on attend toujours les spécialistes qui doivent coordonner les choses au sein de l’EDM afin que ces groups soient réellement mis à disposition de la population. Parceque depuis que ces groupes sont venus, les techniciens doivent quitter Bamako pour venir les mettre en marche. On nous a dit qu’ils devaient arriver mardi (ndlr :30 Mai) , mais jusqu’à preuve du contraire on n’a pas l’information s’ils sont là ou pas. Donc dans ce genre de situation, les autorités doivent former des gens qui resterons au sein de la population de Gao. Et ces groupes qui sont endommagés à Gao, qu’on trouve des personnes ici, qui puissent les réparer ainsi que des pièces de rechanges, comme ça s’il y a un autre problème, ces personnes formées pourrons réparer sans avoir à attendre Bamako ou faire des commandes ailleurs. Ces groupes qui sont venus, ne peuvent pas prendre toute la charge de Gao et je pense que dans peu de temps ils risquent aussi d’être endommagés. Mais il faudra tout faire pour réparer les anciens groupes qui sont là pour renforcer les nouveaux.

Actuellement nous avons 8 heures d’électricité par jour mais même ces 8 heures ne sont pas respectées. La fourniture se fait par section.

N.H : Aujourd’hui, avec la réception de ces groupes, les corps constitués de la société civile de Gao comptent-ils finalement prendre part au referendum ?

A.M.M : Comme nous l’avons dit dès le départ, les conditions étaient que ces groupes puissent être fonctionnels pour essayer de stabiliser la douleur des uns et des autres. Car même à la SOMAGEP, il est clair qu’ils auront besoin d’électricité pour faire fonctionner leur base. Maintenant si tout est aux normes, je ne vois pas ce qui peut empêcher les uns et les autres d’aller au referendum. Tout dépend de si les groupes sont aux normes. Les groupes sont venus mais il faudra que les techniciens puissent les mettre à disposition de la population pour qu’on puisse avoir de l’électricité et de l’eau de qualité le plus vite possible afin de diminuer les souffrances des populations. Mais réellement à part ça, je ne vois pas ce qui pourrait empêcher en tant que Malien et citoyen , de juger ce referendum et d’aller voter. Car si on ne le fait pas, quelqu’un d’autre le fera à notre place. Le referendum est très important et nous sommes des acteurs de la société civile. On a eu à faire des sensibilisations sans même attendre l’Etat par rapport à cela. Donc nous aidons l’Etat mais il ne faut pas que l’Etat pénalise notre population. C’est pour cela que toute chose qui menace nos populations on est obligé de se mettre entre l’Etat et nos populations. Mais si tout est ok, je ne vois rien qui peut nous empêcher d’aller au referendum. Nous irons au referendum dès que les groupes marcherons et qu’on aura notre eau potable.

N.H : Pensez-vous que l’obtention de ces groupes électrogènes contribueront à définitivement mettre un terme aux problèmes de fourniture d’eau et d’électricité dans la ville ?

A.M.M : Ces groupes sont venus mais ne peuvent pas prendre toutes les charges de la ville de Gao. Parceque Gao n’est pas comme Douentza ou comme une autre petite localité. Gao est une grande Ville. D’autres communes qui sont près de Gao sont aussi connectées sur la centrale de Gao, donc il faudra à tout prix réparer les anciens groupes pour les connecter sur les trois groupes qui sont venus afin d’avoir une longue période de fonctionnement.  Sinon si on laisse fonctionner uniquement ces trois groupes, je pense que dans peu de temps nous aurons le même problème. Il faut trouver des solutions durables.

N.H : Un dernier mot pour la fin ? 

A.M.M : Mon dernier mot est que notre transition continue à fournir des efforts, on sait que c’est une phase de transition, et malgré cela nous les voyons comme notre Etat. Tout ce qu’on revendique on le revendique avec eux et tout ce qu’on doit aider pour aider notre état  on les aides en tant que transition aussi à  relever ces défis. Mais il ne faut pas aussi que les décideurs essaient de prendre les maux de la transition pour jouer contre la transition. C’est ce que  en tant que société civile nous refusons. Sinon tout ce qui va dans le contexte de la transition qui amène une évolution, la paix, la sécurité à Gao et au Mali, on est prêts à les accompagner pour stabiliser notre pays. Parceque tout ce que le malien demande aujourd’hui c’est la paix et la sécurité. Donc on remercie notre transition, on remercie aussi tous les responsables des corps constitués qui ont eu à prendre la décision la dernière fois pour démontrer à l’Etat malien qu’il est temps de prendre une décision. On remercie aussi les communicateurs parceque c’est grâce à vous, qui avez été témoins de la situation, qui avez pu faire entendre nos doléances jusqu’au niveau des décideurs pour qu’eux sachent réellement ce qui se passe dans la ville de Gao.

Propos recueillis par Awa Chouaïdou TRAORE – NOUVEL HORIZON

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